La rafle de Noailles (13 août 1944)

par Jean-Yves Bonnard


Cette rafle est l'ultime action de représailles menée contre la population de Noailles à la suite de la découverte du corps d'un soldat allemand à Berthecourt. Le journal L’Oise Libérée du 13 septembre 1944 en fait un rapide récit : "Le cadavre d’un soldat allemand fut découvert le 11 août à 15 heures, sur le territoire de Berthecourt. On croit que ce soldat avait été tué au cours d’une querelle entre Allemands à propos d’une femme."


Premier temps, le  11 août 1944

Noailles est alors occupée par l'unité allemande L62 582. La découverte du corps du soldat conduit très tôt à des mesures de représailles. Le journal rapporte: " Les SS arrivèrent à Noailles dès 17 heures et ouvrirent le feu sur trois hommes qui tentaient de gagner un abri : M. Alexandre Perrotte, un Parisien, et un habitant d’Abbeville, qui furent tous abattus. »

Un rapport de la commune de Noailles au préfet de l’Oise daté du 17 février 1945 précise qu'Alexandre Perrotte, célibataire âgé de  33 ans, est tué rue de Mouy par un "sous-officier, balafré, ayant tiré sur l’ordre d’officiers occupant une auto conduite par l’adjudant Hermann Berger, de l’unité L62 852 cantonnée à Noailles".


Second temps, le 13 août 1944

Les représailles ne s'arrêtent pas là.  Le 13 août, les troupes allemandes procèdent à une rafle et à l'incendie de plusieurs maisons de Noailles. Au cours de leurs actions, ils tuent deux membres de la Résistance communiste.

  • La rafle des hommes

Le même rapport communal expose les faits qui se sont déroulés à Noailles le 13 août: "Nombreux militaires appartenant à plusieurs unités opèrent à Noailles une grande rafle, sous le commandement du colonel Dostler, cantonné au Coudray-sur-Thelle et du lieutenant Hans Garling (orthographe incertaine) commandant l’unité L 62 852, cantonnée à Noailles."

L’Oise libérée complètera ce récit : « Le 13 août, sans autre raison, les Allemands, au nombre de 400, revinrent à nouveau à la charge à 6 heures du matin et cernèrent le bourg. Tous les hommes furent conduits sur la place communale et maltraités. Ils en maintinrent 75 en état d’arrestation et les transférèrent à la prison de la caserne Agel, d’où ils devaient être dirigés plus tard vers l’Allemagne.

Les Allemands se retirèrent finalement après avoir incendié sept immeubles.

Quant aux prisonniers, ils furent miraculeusement sauvés le 19 août quand les Allemands, apprenant que les Américains avaient franchi la Seine, crurent que l’arrivée des Alliés dans la région était imminente. Ils ouvrirent alors les portes des geôles où tant des nôtres avaient été torturés durant les quatre années de l’occupation ».

  • L'incendie d'un quartier de la ville

Sept maisons situées rue de Bonval subissent l'incendie. Il s'agit des maisons de la Veuve Dubois-Charrière, d'Octave Canu, de Cécile Bertrand, de Marius Poret, de Gaston Galland, de M. Peilhe, et de la ferme de Maurice Vivier. Cette dernière ne sera que partiellement touchée par les flammes.

  • La mort de deux membres des FTP

Au cours de leur rafle, les soldats allemands encerclent une maison, rue de Bonvillers. Ils ignorent que s'y trouvent deux résistants FTP qui doivent participer non de là à une réunion de responsables FN, FTP, CGT et PC de l'Interrégion : Jean Lagarrigue (alias colonel Boyer) et Albert Meunier (alias Charles). Cerné par les troupes allemandes, Albert Meunier décide de passer à l'action et lance des grenades mais est tué par une balle ennemie.

Jean Lagarrigue est arrêté et regroupé avec d'autres raflés dont M. Bloquet. Ce dernier lui déconseille de s'évader mais Lagarrigue ne l'entend pas de même. Prétextant une envie pressante, Lagarrigue fait mine d'aller au WC et court pour sauter le mur de clôture. Il est abattu d'une balle dans le bas ventre et d'une autre dans la tempe gauche, allée Fabignon.

Enterrés dans le cimetière de Noailles, les corps de Lagarrigue et de Meunier seront exhumés respectivement les 11 août 1945 et 6 septembre 1945, en présence d'anciens FFI de la commune.


Sources:

Archives départementales de l'Oise, Rapport du maire de Noailles au préfet de l'Oise, 33W8259.