Section Speciale d-Amiens

La section spéciale d'Amiens en 1941-1942

par Jean-Pierre Besse


Les dossiers de la section spéciale près de la cour d'appel d'Amiens, conservés aux archives départementales de la Somme, sont très incomplets. Ont-ils été expurgés? Toujours est-il qu'entre les premiers procès, en septembre - octobre 1941, et un procès en janvier 1944 ne figurent aucun des jugements concernant les résistants oisiens, que nous ne pouvons donc connaître que par leur annonce dans la presse. En revanche, tous les dossiers concernant le marché noir et les abattages clandestins semblent avoir été conservés.

Pour juger les infractions au décret du 26 septembre 1939 portant dissolution du Parti communiste, le premier procès de la section spéciale impliquant un oisien se tient le 12 septembre 1941. 
Jean Smelten, épicier débitant à Boury-en-Vexin, est condamné à deux ans de prison, cent francs d'amende et cinq ans d'interdiction de ses droits civiques. Transféré à Fresnes, Jean Smelten meurt à la Centrale de Poissy le 6 janvier 1943.

Le 20 octobre 1941, le deuxième procès concerne Gilbert Pichard et Jules Urier. Ils sont condamnés à trois ans de prison et 1 200 francs d'amende. Ils ont été arrêtés dans le cadre de la même affaire qui conduit, le 29 octobre 1941, neuf autres militants et résistants devant cette juridiction spéciale. (voir document ci-contre).

Toutes les personnes condamnées en octobre 1941 sont par la suite déportées. Seuls, Marcel Vermont et Charles Jacquin sont revenus des camps.

En mars 1942, s'ouvre le procès des cheminots de Creil arrêtés en décembre 1941. Membres du Secours populaire, ils voient leur cas disjoint des poursuites engagées contre Marcel Deneux, Maurice Genest, tous les deux en fuite, et Louis Cam, alors interné à l'hôpital psychiatrique de Clermont.

Marcel Deneux, Maurice Genest et Georges Decock sont jugés par contumace le 21 mai 1942. 
Marcel Deneux est condamné à mort, Maurice Genest aux trav
aux forcés à perpétuité et Georges Decock à vingt ans de travaux forcés.

 

Sources :

AD Somme, 963 W 1 - AD Oise, 33 W 8 250, sabotages - AD Oise, 72 W 100 - Le Progrès de l'Oise, 24 janvier 1941, quotidien - La Tribune de l'Oise, 1940-1944, quotidien.

La Tribune de l'Oise, 7 novembre 1941

La section spéciale en 1943

Les procès de 1943 peuvent être classés en deux catégories. Ceux intentés à des militants communistes clandestins chargés de reconstruire ou de diriger le parti dans différentes régions du département. Ceux intentés aux auteurs des premiers sabotages de 1942.

Le 3 avril, Maurice Genest, arrêté en octobre 1942, est une nouvelle fois condamné à vingt ans de travaux forcés, les deux militants arrêtés avec lui, Edgar Gordien et Pierre Tarlier, sont condamnés à un an de prison et 1 200 francs d'amende. Ils sont tous les deux morts en déportation.

Le 6 avril, quatre militants de la région de Méru sont condamnés : Julien Moreau à trois ans de prison, Raymond Léourier, Raymond Coquelet et Victoria Cappe à un an de prison, chacun se voit infliger une amende de 1 200 francs.

Les quatre condamnés sont par la suite déportés. Victoria Cappe, candidate communiste aux élections municipales de 1925 à Montreuil, meurt à Ravensbrück, Raymond Léourier meurt aussi dans les camps.

Quelques jours plus tard, Adolphe Margerin, ouvrier domicilié à Nogent-sur-Oise où il s'est installé au lendemain de l'armistice, est condamné à quinze ans de travaux forcés.  Présenté comme l'organisateur du parti dans la région de Pont-Sainte-Maxence, il est arrêté à Rouen (a-t-il des responsabilités interrégionales?). Le 19 septembre, Edouard Pernot, peintre à Saint-Germer-de-Fly, est condamné à un an de prison et 1 200 francs d'amende. Sa photographie a été trouvée sur un interrégional du Parti communiste arrêté à Dreux (René Gaire). Adolphe Margerin et Edouard Pernot sont morts en déportation.

Le 31 juillet, ce sont les Jeunesses communistes qui sont frappées. Claudine Petit est condamnée à vingt ans de travaux forcés, Raymond Vasseur et René Didelet à quinze ans, Jacques Fillon, Martial Bee et Fernand Charache à dix ans. Tous par défaut. Lucien Régnier, Jean Gossiaux et Albert Cléry, tous de Chambly, sont condamnés à cinq ans de prison et 60 000 francs d'amende.

Trente-neuf résistants, arrêtés entre août et octobre 1942, lors du démantèlement des groupes de l'OS, sont déférés en janvier, mars et juillet 1943 devant la section spéciale. Les peines prononcées vont des travaux forcés à perpétuité à un an de prison, sans compter les peines d’amende. Un seul est relaxé (Marcel Landry).

La condamnation, le 21 décembre, de trois hommes jugés pour l'attaque de la mairie d'Ons-en-Bray et l'assassinat du maire, Palin, pose problème. Rien ne prouve que cette action relève de la Résistance communiste.

 

Sources :

AD Oise, 33 W 8 250 - AD Oise, 33 W 8 251 - La Tribune de l'Oise, 1940-1944, quotidien.



La section spéciale en 1944

L'activité de la section spéciale semble diminuer considérablement en 1944.

Le 15 janvier, sont jugés les auteurs de l'accrochage de Mogneville en septembre 1943 : Charles Dupuich et Maurice Camin, en fuite, sont condamnés à cinq ans de travaux forcés. Il en est de même pour Marcel Langlois et André Lacroix.

Le 5 février, Etienne Stopin est à son tour, pour la même affaire, condamné à dix ans de travaux forcés. Le 22 avril, c'est Jean-Louis Beausseaux qui est condamné à cinq ans de travaux forcés.
Le dernier procès pour l'Oise est celui qui se tient contre Marceau Horcholle et Jean Frank. Ils ont été arrêtés le 28 août 1943 vers 10 h, au cours d'un contrôle des inspecteurs de la 21e brigade régionale de sûreté. Jean Frank, malade, ne peut comparaître. Il est impossible, dans l'état actuel de nos sources, de connaître le jugement prononcé. Raymond Vasseur est aussi jugé, une nouvelle fois par contumace, lors de ce procès.

 

Sources:

AD Oise, 33 W 8 243 - AD Oise, 33 W 8 250 - AD Oise, 33 W 8 251 - AD Somme, 963 W 8.

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